Cette série de films « Mother » sur ma mère donc, comment je peux la faire ?
Comment fait-on de tels films sans sombrer dans un pathos gênant ? Comment aborde-t-on le vivant à partir de la mort ? Et comment préserve-t-on l’intimité tout en la racontant ?
Je me pose ces questions, mais en fait elles ne m’ont pas traversé l’esprit quand j’ai réalisé le premier épisode. De telles questions n’émergent qu’après. Si on se retourne trop le cerveau, on ne fait rien de bon, surtout dans ces moments là. Quand survient la mort d’un proche, plus rien n’est rationnel.
En fait, j’avais et n’ai juste pas le choix, c’est tout.
Perdre sa mère, c’est bouleversant. On trébuche. On perd l’équilibre. Et ensuite et bien tout devient de l’après. C’est un nouveau chapitre, celui de la vie sans.
Je ne pouvais de toute façon pas rester muet face au départ de ma mère. Je ne pouvais pas rien faire. Et faire des films a toujours été mon langage.
Les premiers épisodes sont donc venus comme ça, sans préparation. Le tout premier, c’était en plein confinement. Je filmais ma fille qui jouait dans le jardin. Je la regardais et je voyais de la vie, tout le contraire.
Puis, je filmais et filmais sans cesse. Je pense que je ne voulais pas refaire les mêmes erreurs. Alors je faisais encore plus d’images.
J’ai l’impression désormais de filmer ceux que j’aime pour ne pas qu’ils meurent à leur tour.
Avec du recul, évidemment je pense que je voulais que ma mère continue de vivre. D’une autre manière, je cherchais à lui redonner son souffle à travers son histoire. Je me devais donc de faire parler ma famille et qu’elle lui redonne la parole.
Quand quelqu’un meurt, j’ai toujours eu peur de ne plus me rappeler de sa voix. Le son, le timbre, tout ça ça disparait avec le temps et à chaque fois ça me plonge dans une implacable nostalgie.
[MAJ 01 avril 2024 – le premier épisode est désormais en ligne]
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